dans Droit de la famille, Droit des successions

Depuis le 30 juin 2025, sont entrées en vigueur les dispositions sur l’union parentale. Moult écrits ont été publiés sur le sujet. Nous proposons de limiter notre propos à l’impact de l’union parentale sur la pratique successorale.

Rappelons d’abord ce qu’est l’union parentale ?

L’art. 521.20 du Code civil du Québec prévoit que l’union parentale est créée dès que deux personnes qui sont conjoints de fait ont ou adoptent un enfant[1].

Quels biens sont inclus dans l’union parentale ?

L’art. 531.30 du Code civil du Québec précise quels sont les biens visés par l’union parentale :

Le patrimoine d’union parentale est composé, dès sa constitution, des biens suivants dont l’un ou l’autre des conjoints est propriétaire : les résidences de la famille ou les droits qui en confèrent l’usage, les meubles qui les garnissent ou les ornent et qui servent à l’usage du ménage et les véhicules automobiles utilisés pour les déplacements de la famille. Sont toutefois exclus du patrimoine d’union parentale les biens qui sont échus à l’un des conjoints par succession ou donation avant ou pendant la durée de l’union.

Comme pour le patrimoine familial, l’union parentale ne procure pas un droit de propriété, mais un droit de créance. Ce qui est partageable entre les conjoints de fait sera la valeur nette des biens et non leur droit de propriété. Chacun des conjoints demeurera propriétaire de ses propres biens.

Quand s’ouvre le droit au partage de l’union parentale?

La dissolution de l’union parentale a lieu au moment de la séparation des conjoints de fait ou au moment du décès de l’un de ces conjoints. Lors de la liquidation d’une succession d’un conjoint en union parentale, il faudra faire le partage des biens inclus dans le régime de l’union parentale, comme on le fait pour le patrimoine familial des conjoints mariés.

Comment se calcule le partage des biens faisant partie du régime de l’union parentale?

Encore une fois, comme pour le patrimoine familial, on tiendra compte de certains éléments, comme la valeur marchande d’un bien au moment du début de l’union et à la fin de celle-ci, des dettes reliées à ces biens et des apports faits avec des sommes ou des biens détenus avant le mariage ou reçus par succession ou donation par chacun des conjoints.

Est-il possible de s’exclure de l’application des règles de l’union parentale ?

Non, mais il est possible d’exclure certains biens ou même tous les biens pour éviter le partage lors de la fin de l’union parentale, et ce, en tout temps, en autant que les deux conjoints de fait en conviennent ainsi. Il est à noter que l’exclusion des biens n’entraîne pas la fin du régime d’union parentale. Les autres dispositions (protection de la résidence familiale, prestation compensatoire et vocation successorale) demeurent. L’exclusion doit se faire, sous peine de nullité, par acte notarié en minute[2].

Également, il est possible pour le créancier de la créance issue du partage de l’union parentale, de renoncer par acte notarié avant l’expiration du délai de 1 ans de la date du décès. À défaut de publier la renonciation avant l’expiration de délai de 1 an, le conjoint sera réputé avoir accepté.

Autre impact de l’union parentale sur les successions

La loi accorde maintenant au conjoint de fait en union parentale la vocation successorale. Dans le cadre d’une dévolution légale[3], le conjoint de fait en union parentale fera partie de la liste des successibles, comme le conjoint marié ou uni civilement.

À titre d’exemple, si un conjoint en union parentale décède sans testament avec des enfants, le conjoint recevra un tiers de la succession et les enfants deux tiers.

Que faire plus spécifiquement lors de la liquidation d’une succession d’un conjoint de fait en union parentale?

Tout d’abord, il faut vérifier si le défunt et le conjoint survivant était en union parentale. Vous devrez donc appliquer les critères prévus aux articles 521.20 et suivants du code civil.

Pour être en union parentale, il faut :

    • Être les parents d’un même enfant qui est né ou a été adopté après le 30 juin 2025;
    • Être en union de fait, c’est-à-dire, que les deux parents doivent faire vie commune et se présenter publiquement comme un couple, sans égard à la durée de leur vie commune. Sont présumées faire vie commune les personnes qui cohabitent et qui sont les père et mère ou les parents d’un même enfant (art. 521.20 C.c.Q.).

Il pourra être difficile, à certaines occasions, de déterminer si le conjoint décédé était en union de fait. Comme cette situation en est une de fait et qu’il n’est pas obligatoire d’avoir une convention entre conjoint ou que la situation soit consignée dans un registre, le praticien devra obtenir certaines preuves. Ces preuves peuvent être : une déclaration sous serment du conjoint survivant ou de proches personnes, la preuve que les conjoints ont été reconnus comme tels par une loi (ex. indemnité de la SAAQ, de l’IVAC ou de la CNESST, reconnaissance du conjoint comme conjoint survivant par un administrateur de régime de retraite, déclarations fiscales et avis de cotisation qui prouvent qu’ils se sont déclarés comme conjoints aux autorités fiscales).

Conclusion

Nous pensons que le plus grand enjeu en matière successorale sera de déterminer si les conjoints étaient en union parentale pour que le conjoint survivant puisse se qualifier comme successible dans le cadre d’une succession dont la dévolution sera légale.

Nous ne saurions trop insister sur la nécessité et l’importance pour les conjoints de fait de rédiger ou de mettre à jour leur testament. Comme juriste, notre rôle est de conseiller nos clients en ce sens. Depuis l’adoption des règles sur l’union parentale, beaucoup de légendes juridiques ont cours et il est important de renseigner adéquatement la population que l’union parentale n’est pas un synonyme de protection absolue en cas de décès de l’un des conjoints.

 


[1] Les règles transitoires prévoient que les dispositions s’appliquent à un couple dont au moins un enfant est né ou adopté après le 30 juin 2025.

[2] Art. 521.30 C.c.Q.

[3] L’article 653 du Code civil du Québec a été modifié afin d’inclure le conjoint de fait ne union parentale dans la liste des personnes qui détiennent la vocation successorale.

 

 

 

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